Cela fait plusieurs années que le site de Saint-Sauveur à Lille – ancienne gare de triage devenue friche – est au centre d’un conflit entre la mairie et des associations. Tout commence en 2017 lorsque la Métropole Européenne de Lille (MEL) et la Ville de Lille soumettent leur projet d’aménagement au Préfet qui, au titre de la « Loi sur l’Eau », doit donner son accord pour réaliser des travaux dans une zone comportant des nappes phréatiques ; autorisation délivrée en mai 2018, qui ne passe pas auprès de deux associations[1] qui déposent un recours. En ligne de mire : protéger les ressources d’eau potable d’une région de plus en plus concernée par la sécheresse, et conserver des espaces verts dans une ville bétonnée. Par chance pour les opposants au projet, les dossiers présentés lors des enquêtes publiques se révèlent être incomplets voire inexacts. La ville paye son impréparation au prix fort puisque le projet est annulé en octobre 2021 à la suite d’une décision de justice. Une nouvelle enquête publique a été menée l’été dernier pour corriger les carences du dossier précédent, et le tribunal administratif de Lille a confirmé le 9 juin 2023 la régularité du projet qui, d’après l’hydrogéologue Jean-Philippe Carlier, ne présente aucun risque sur les eaux souterraines.
La capitale des Flandres tourne la page et se projette dans ce projet déclaré d’intérêt général, qui prévoit l’aménagement d’un site de 23 ha, laissé à l’abandon et longtemps occupé par des campements de migrants. Au programme : environ 2000 logements, 8 ha d’espaces verts, une salle de sport, des espaces de loisirs et une piscine olympique. Alors que le président de la MEL Damien Castelain avait promis qu’une fosse de plongée, prévue dans le projet initial, ne serait finalement pas construite, celui-ci revient sur sa décision et n’exclut plus l’idée. Ce qui pourrait devenir la plus grande fosse de plongée de France, et l’une des plus profondes d’Europe avec ses 42 mètres, n’est pas vue d’un bon œil par les associations et les forces politiques – EELV et FI – qui viennent se greffer à l’opposition. À l’heure où l’eau manque, l’ambition de la ville interroge : le futur complexe aquatique consommerait plus d’eau que l’actuelle piscine Marx-Dormoy ; sujet sur lequel avait buté la mairie de Lille lors de la présentation de son étude d’impact qui omettait la consommation en eau dudit complexe, passant de 250 000 m3 à 345 000 m3 après révision. Si ce site en décrépitude devait bénéficier d’une attention de la ville, le projet en vigueur interroge sur la responsabilité des élus à promouvoir des économies en eau. La décision du tribunal administratif favorable à la MEL et la Ville de Lille n’a pas empêché l’association PARC Saint-Sauveur de déposer un recours en mars avec pour cible, le chiffrage du chantier n’ayant pas intégré le coût grandissant des matières premières.
[1] PARC (Protection aménagement réappropriation collective de Saint-Sauveur) et ASPI (Association pour la suppression des Pollutions Industrielles)
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