« Transitions, le temps de l’action » : le thème du 24ème Forum des Projets Urbains, organisé le 19 novembre à Paris par Innovapresse (Groupe Ficade), a trouvé de nombreuses illustrations au fil des ateliers-projets et des ateliers stratégiques, dessinant le futur d’une ville sobre, régénérative, renaturée, mais aussi habitée et productive. 

Sobre : c’est la stratégie « ville circulaire » de Bordeaux Métropole ; un immeuble manifeste de la construction bois, Wood Up à Paris ; un quartier démonstrateur de la ville durable (Corbeville à Paris-Saclay) ; un appel à projets urbains mixtes et bas carbone (« Empreintes » à Paris La Défense)…

Régénérative : c’est la préservation et l’adaptation au changement climatique du centre de Brest ; la transformation de bureaux en logements à Fontenay-sous-Bois, d’une zone d’activités en un quartier mixte et résilient (Marseille/Canet ouest), ou de friches industrielles et artisanales en un quartier méditerranéen (Marseille/Cazemajou) ; la co-construction d’une rénovation urbaine d’ampleur à la Mosson à Montpellier ; la recomposition d’un espace de friches ferroviaires et industrielles (ZAC des Groues à Nanterre) ; la (re)mise en urbanité d’entrées de villes (ZA Nord-Coteaux de l’Ille à Rennes) ; la restauration d’une continuité urbaine (franchissement urbain Pleyel à Saint-Denis)…

Renaturée : c’est la constitution d’une infrastructure paysagère d’envergure métropolitaine à Lille Métropole ; la création d’un bois urbain au cœur du quartier d’affaires de Lyon-Part-Dieu ; un grand parc linéaire sur une ancienne piste d’aviation (Piste des géants à Toulouse) ; un parc et un ensemble résidentiel sur un ancien site ferroviaire (Chapelle Charbon à Paris)…

Habitée : c’est la poursuite de la mutation de l’Île de Nantes avec le quartier de la République ; l’insertion d’une infrastructure dans la ville tout en produisant des logements (opération Belgrand à Paris) ; la réduction drastique de l’empreinte carbone d’un aménagement tout en créant un quartier agréable à vivre, résilient et inclusif (Nantes Pirmil les Isles) ; un programme de logements bas carbone à Rueil Malmaison (Stellata)… 

Productive : c’est le développement d’un pôle industriel d’envergure sans renoncer aux exigences environnementales et à la qualité du paysage (Paris-Villaroche à Sénart) ; l’intégration des enjeux de sobriété foncière, de qualité paysagère et d’agriculture au cœur d’un pôle économique à Bussy-Saint-Georges ; l’alliage d’un plan-guide et de plusieurs projets démonstrateurs dans les domaines productif, tertiaire, commercial, agricole, des mobilités et des espaces verts (Lyon Grande Porte des Alpes)…

Dans un format renouvelé, le FPU a proposé cette année aux 1500 participants, outre ses traditionnels ateliers-projets et son atelier « ville invitée » (l’ambitieuse stratégie d’« urbanisme lumière » de Montevideo en Uruguay), des cycles thématiques, des approches territoriales, des regards d’élus.

Mais dans quelle mesure les conditions pour « l’action » sont-elles bien réunies ? Parmi les écueils identifiés figure le besoin de stabilité et de visibilité réglementaire. Trop de réglementation ? Beaucoup préfèrent voir dans cette contrainte un moyen d’inciter à l’innovation, à « faire bouger les lignes » comme l’explique Marion Apaire, directrice générale adjointe de Paris&Co, « à charge pour nous de décrypter ces obligations, d’outiller les acteurs… ». Besoin aussi de beaucoup de dialogue entre les parties prenantes d’un projet (Morgane Colombert, directrice des études d’Efficacity). Et nécessité, surtout, de garder toujours en tête que les territoires et leurs acteurs ne pourront pas faire l’économie de l’atténuation et de l’adaptation : « Les crises [écologique, sociale, financière…] ne peuvent pas servir de monnaie d’échange les unes avec les autres », pointe Jean Guiony, fondateur de l’Institut de la transition foncière. Il faut donc les appréhender de front et aller vers « un changement de modèle économique [des opérations d’aménagement] pour que la création de valeur ne repose pas uniquement sur l’échange de foncier ». 

Changer le modèle économique de l’aménagement, la question est ardue mais s’annonce incontournable. Elle fait l’objet de travaux du RNA (Réseau national des aménageurs) dont les deux co-présidents, Sarah Bellier (EPA Nice EcoVallée) et Nicolas Gravit (Eiffage Aménagement) dialoguaient en séance de clôture avec Sylvain Grisot (dixit.net) sur les façons de « changer de cap »*. « Je suis convaincu que nous ne vivons pas une nouvelle crise à l’issue de laquelle nous pourrons nous organiser comme on le fait d’habitude pour passer le cap », avertit Sylvain Grisot. C’est plutôt la fermeture d’une parenthèse heureuse où on a su mener les projets, massifier la production, optimiser nos process, produire du neuf, consommer du sol agricole, couler du béton, etc. On a répondu à des besoins sociaux, des besoins de croissance, mais cela nous met aujourd’hui complètement dans l’impasse et c’est au cœur de la crise environnementale. Ce doit donc être le signal d’une accélération de la transformation des pratiques ». (MCV) 

*Le débat de la séance de clôture du FPU sera publié dans le n°149 du magazine Traits urbains.