Quartier singulier s’il en est, le centre-ville de Villeurbanne (Rhône) et ses fameux Gratte-Ciel font des émules. A quelques pas de l’œuvre de Môrice Leroux, l’extension du centre-ville se prépare. Cette fois, ce sont Nicolas Michelin et l’agence Anma qui se chargent d’imaginer les Gratte-Ciel de demain sur 8 hectares au nord du quartier historique. Il inscrit ses pas dans ceux de son aîné. « Prolonger les Gratte-Ciel existants du centre-ville, c’est parier sur la densité et la hauteur. Le succès des Gratte-Ciel imaginés par Môrice Leroux en 1930 tenait à son originalité spatiale, son confort domestique et son principe constructif innovant. Les nouveaux Gratte-Ciel prolongent sans copier cette architecture, ils s’en inspirent et cherchent à résoudre la difficulté de construire en grande hauteur avec des matériaux biosourcés et bas carbone. L’innovation et l’audace sont donc inhérentes au projet qui devient un marqueur de l’architecture de demain face aux enjeux du réchauffement climatique », indique Nicolas Michelin. Aménagée par la Serl (Société d’équipement et d’aménagement du Rhône et de Lyon), la Zac des Gratte-Ciel accueillera 855 nouveaux logements dont 60 % de logements aidés et une résidence étudiante de 101 chambres. Elle abritera également un immeuble de bureaux de 4900 m2 et 15800 m2 de commerces et services ainsi que de nombreux équipements, notamment un cinéma et un pôle dédié à la jeunesse. Enfin, plus de 2,7 hectares seront réservés aux espaces publics au sein desquels 300 nouveaux arbres seront plantés. Les travaux commencent, ils s’achèveront en 2030.

Belles hauteurs, prix maîtrisés

Neuf équipes d’architectes se partagent les quatre îlots du projet. Elles ont été chargées de tracer les lignes des futurs immeubles avec la consigne donnée par Nicolas Michelin « de respecter les cotes de Leroux et de privilégier une densité raisonnable et aimable ». Les nouveaux immeubles feront donc la part belle à la verticalité avec une bonne dizaine d’étages. Chacun sera doté d’extérieurs - balcon ou terrasse - et chaque appartement sera multi-orienté pour plus de confort. Pour le calme, les architectes ont choisi de ne distribuer les appartements qu’à partir du deuxième étage, soit une bonne dizaine de mètres au-dessus du sol pour se préserver de l’effervescence du quotidien. Enfin, chaque immeuble sera équipé de locaux communs, notamment des parkings à vélos et d’espaces partagés prenant la forme d’îlots de verdure, de jardins suspendus et de terrasses-jardin. Les principes constructifs retenus s’appuient sur l’utilisation de matériaux biosourcés pour parvenir à édifier des immeubles peu consommateurs en énergie et utilisant les énergies renouvelables grâce à la géothermie, au bioclimatisme et au réseau de chaleur urbain.

Le choix des acteurs du projet se porte résolument sur des logements qualitatifs, reprenant là aussi la voie ouverte par Leroux. Une bonne partie des appartements resteront accessibles à des prix bien en deçà de ceux du marché. Ainsi, sur les 855 appartements, seuls 132 logements se négocieront aux prix du marché. Les 215 autres appartements en accession libre seront commercialisés sur des bases de – 5 % par rapport aux prix moyens du marché. « Il n’est plus possible de voir que l’on s’approche de la moyenne de 7 500 euros du mètre carré à Lyon et Villeurbanne, donc nous imposons des plafonds car nous souhaitons maintenir une offre accessible et abordable dans notre centre-ville », défend Cédric Van Styvendael, maire (PS) de Villeurbanne. Le reste de la programmation s’articulera entre 181 logements en Bail réel solidaire (BRS), 29 logements participatifs, 190 logements sociaux (PLUS/PLAI) et 101 chambres étudiantes. « Ce quartier sera à l’image de la métropole que nous voulons : accessibles à toutes et tous », se félicite Renaud Payre, vice-président de la métropole délégué à l’habitat, au logement et à la politique de la ville. Côté calendrier, les premiers travaux devraient être lancés en milieu d’année prochaine pour des livraisons attendues à partir de 2026. Quartier d’habitat, les nouveaux Gratte-Ciel promettent également des animations et une offre de commerce organisée dans la tradition à nulle autre pareille du quartier villeurbannais. Les 15 800 m2 , soit une quarantaine de locaux commerciaux, seront ainsi achetés et gérés par la Société Villeurbannaise d’Urbanisme (SVU), déjà propriétaire et gestionnaire des immeubles des GratteCiel et de leurs socles commerciaux. « Nous pourrons ainsi travailler sur une complémentarité de l’offre commerciale entre le Sud et le Nord du quartier pour créer un véritable parcours marchand », explique Agnès Thouvenot, adjointe au maire déléguée à la transition écologique, l’urbanisme et l’habitat. La SVU porte également un projet de Halles Gourmandes en accompagnement de l’offre de nouveaux commerces. Au-delà de la diversité et de la complémentarité de l’offre, les élus villeurbannais souhaitent également mettre à profit cette maîtrise directe pour accompagner les futurs commerçants vers une démarche d’exploitation écoresponsable.

La nature gagne de la place

En marge du bâti, le futur quartier central de Villeurbanne fera la part belle à la nature. C’est l’atelier de paysage et d’urbanisme In Situ qui est à la baguette de l’aménagement des espaces publics. Un premier pas a été franchi avec la livraison de l’esplanade du nouveau lycée, premier chainon d’un mail paysager. « Cette première réalisation a permis de mettre en œuvre un petit espace public fertile, sobre et frugal qui fait office de planche témoin des aménagements à venir », décrivent les paysagistes. L’idée est d’aménager de larges fosses de terre végétale continues pour accueillir des plantations d’arbres, de cépées et de vivaces en strate basse. L’objectif est double : non seulement ces bandes de terre permettent l’infiltration des eaux, mais en plus elles amènent des îlots de fraicheur. Ces fosses seront positionnées en bordure de rue et des espaces publics. Pour mener à bien l’ensemble du projet, la Ville, la Métropole et la Serl vont mettre en place une organisation de chantier sobre, notamment pour les approvisionnements. Cette logistique de chantier a été retenue parmi les projets « démonstrateurs de la ville durable », dipositif piloté par la Banque des territoires dans le cadre du programme France 2030. (FS)

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Un projet présenté au Forum des Projets Urbains le 14 novembre 2022 par Agnès Thouvenot, 1ère adjointe en charge de l'urbanisme, l'habitat et la transition écologique, Ville de Villeurbanne, Cécile Bossière, cheffe de projet, SERL, Nicolas Michelin, Urbaniste en chef, Agence ANMA, et Sébastien Chambe, Directeur général adjoint Urbanisme et Mobilités, Métropole de Lyon.

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