C’est un peu le cœur du cœur du réacteur. Dans la vaste Zac des Deux-Rives formant le nouveau morceau de ville de 74 hectares de Strasbourg, le secteur Starlette assure l’articulation et la transition entre la partie du projet urbain tournée vers le centre-ville et celle qui mène au Rhin sur les terrains portuaires en cours de reconquête. La municipalité écologiste élue en 2020 accorde dès lors à cette friche charbonnière une attention particulière dans son entreprise de révision – sans révolution – des principes directeurs d’aménagement définis durant la mandature socialiste précédente avec l’équipe de maîtrise d’œuvre TER-51N4E-List et mis en œuvre par la SPL DeuxRives : plus d’équipements publics, un peu moins de logements, renforcer la végétalisation des espaces publics et leur rapport à l’eau, en somme la construction d’un quartier bas carbone et plus « éclaté ». Ce dernier objectif trouve son illustration dans le résultat de la plus récente construction d’envergure à Starlette : l’ensemble déclenché par la prochaine implantation sur place de l’école hôtelière internationale Vatel. « La fin des macro-lots s’incarne ici », résume Jean Werlen, président de la SPL. En effet, ce projet se répartit entre trois lots dénommés « StarCoop », de 4 000 à 9 700 m2 unitaires. Tous ont été attribués au groupe Marignan, mais sont dessinés par trois équipes d’architectes différents, en succession d’un premier projet que le promoteur avait présenté d’un seul bloc de quelque 30 000 m2, sur une autre partie de Deux-Rives - le secteur au bord du Rhin - en réponse à un appel à projets de la SPL en macro-lot. La proposition Marignan-Vatel était finalement arrivée seconde de cette compétition soldée fin 2019 - à trois mois des municipales - par la désignation de Bouygues Immobilier et Linkcity pour une autre affectation.
Nouvelle centralité
Replacé dans Starlette, ce « pôle Vatel » change donc de volumétrie, de dimension totale (22500 m2) mais aussi de statut. Son emplacement lui assigne l’objectif de « donner naissance à une nouvelle centralité pour ce secteur qui sera doté de commerces, restaurants, équipements publics (maison de la petite enfance, etc.) de part et d’autre de la ligne de tram », décrit la SPL, et ainsi de « dynamiser la vie de quartier tout en préservant des qualités paysagères, architecturales et environnementales fortes ».
A ce dernier titre, le projet initialement élaboré en réponse au macro-lot a été retravaillé en particulier avec le bureau d’études Tribu qui a rejoint la maîtrise d’œuvre urbaine. Les trois lots ont dû se conformer à des recommandations d’approche bioclimatique, d’installations énergétiques « simples, performantes et pérennes », de recherche de la récupération de la chaleur fatale et de production d’énergies renouvelables, de choix prioritaires de matériaux biosourcés, locaux et faiblement émissifs en composés organiques volatils, et d’intégration du végétal. Ce qui a débouché sur des « schémas de prescription climatiques » pour chaque lot, incluant par exemple une ventilation naturelle traversante, l’évapotranspiration en cœur d’îlot, l’épannelage décroissant de sorte à permettre au soleil d’hiver d’atteindre les cœurs d’îlot, l’amplification des surfaces vitrées en façades est, sud et ouest, sans oublier les toitures végétalisées ou les protections solaires extérieures (brise-soleil orientables, etc.)
Rez-de-chaussée actifs
Au regard de ces critères, le jury a porté son choix sur les projets respectivement de Clément Vergely, du duo TOA-Lucquet et d’Atelier du Pont. Sur « StarCoop 1 », Vergely Architecture s’associe à Itinéraire Bis Paysagistes pour façonner le volet principal du projet : l’école hôtelière Vatel elle-même, flanquée d’un restaurant d’application, d’un hôtel d’application de 88 chambres au standing 3 étoiles, d’une résidence étudiante de 193 appartements T1 à T4, d’une boulangerie et d’une pharmacie en rez-dechaussée. Soit un total de 9 636 m2 de surface de plan cher, à construire de septembre 2023 à septembre 2025. Pour le second lot représentant 8 785 m2 , le tandem d’architectes alsaciens joint à sa proposition la paysagiste Françoise Marie pour dessiner 70 logements, une résidence pour jeunes actifs, un café d’application de l’école et une brasserie, selon un planning de chantier en décalage d’un an par rapport au premier lot, aboutissant à une livraison en septembre 2026. Quant à StarCoop 3, l’approche d’Atelier du Pont portera sur 4 088 m2 au calendrier calé sur StarCoop 1 : 65 logements d’une à cinq pièces, dont 6 en locatif social, complétés d’un « rez-dechaussée actif autour de la santé ».
La variété architecturale - à relativiser par le fait qu’elle s’inscrit dans un cahier des charges bien précis - entend ainsi se conjuguer à une mixité fonctionnelle qui caractérise également le « nouveau » pôle Vatel par rapport à sa mouture initiale. La composante logement répond au besoin de concevoir une offre pour les futurs élèves, dont il est prévu qu’ils viennent de différents horizons, notamment d’Allemagne, tout en mêlant ce public à un profil d’habitat plus classique (accession, locatif social…). Et tous les rez-de-chaussée sont rendus « actifs » par des commerces, restaurants et autres services (pôle médical), orientés soit vers la route du petit Rhin, nouvelle épine dorsale de la Zac des Deux-Rives en général et de Starlette en particulier, soit vers le bassin Vauban de transition avec le centre-ville, soit encore vers les quais.